RÉSUME
Avec La carte d'identité, la littérature africaine est véritablement parcourue d'un frisson nouveau.
Un
jour, le vieux Mélédouman qui se dit prince de l'ancien royaume de
Bettié est arrêté et présenté à un commandant de cercle qui lui demande
de présenter sa carte d'identité.
Comme il ne l'a pas sur lui, il est
incarcéré dans une geôle infâme, battu et longuement torturé.
Il reçoit
de l'acide et du piment dans les yeux ce qui le rend aveugle.
Lassé de
le voir croupir dans ses excréments et empester la prison, le commandant
le renvoie chez lui en lui donnant une semaine pour retrouver la
fameuse carte d'identité manquante.
Conduit par sa petite-fille, Ebah
Ya, que retrouvera le vieil homme en rentrant chez lui ?...
Un roman africain à la fois très littéraire et très oral sur le thème de
l'identité, de la liberté et de la dignité.
Une condamnation sans appel
de la colonisation, cette aliénation absolue qui fait perdre toute
identité à celui qui doit la subir.
Une histoire d'une très grande
simplicité qui dérive même un moment vers l'étrange et le
fantasmagorique pour s'achever de la façon la plus prosaïque qui soit
comme si l'auteur avait voulu ancrer son ouvrage dans la banalité et la
médiocrité après une longue suite d'envolées lyriques.
Le style de
l'auteur est original et même surprenant. Il mêle de longues poésies à
des discours didactiques et même filandreux et des descriptions plutôt
ennuyeuses à des considérations philosophiques ou politiques tranchées.
AAA
MORCEAUX CHOISIS
- "tu serais bien le premier nègre courageux et honnête,famille royale ou pas. Laisse-moi t'admirer. En effet,l'espèce du nègre courageux et honnête est tellement rare qu 'il faudrait l'exposer dans un musée zoologique,non sans /'avoir décoré avant de le vouer a l'adoration religieuse de son illustre tribu. Tout le monde sait ici qu 'un animiste n 'en est pas plus a un dieu qu 'à une femme près."
-
"On adore bien les animaux, les plantes, les arbres, les serpents, les montagnes, les pierres, les fleuves et leurs génies ! Bref, n 'importe quoi. A plus forte raison le premier saint nègre."
-
"Il faut reconnaître que la langue française est un facteur d'unité.
Chaque ethnie, chaque tribu a son dialecte, enfin sa langue. Par
exemple, moi, je suis un Attié, j'enseigne en pays agni. Si ce n'est en
français, en quelle autre langue voudriez-vous que j'enseigne ? Mon
collègue de la classe voisine est un Guinéen. Tu vois donc, Nanan, dans
ce petit cercle que nous formons, sans la langue française, il aurait
fallu au moins deux interprètes pour mon collègue et moi, sans parler
des élèves, qui parleraient aussi bien le peul que l'agni ; et un autre
entre l'Attié que je suis et l'Agni que vous êtes (…) Le français
permet, de Brazzaville à Abidjan, en passant par Dakar, à tous les
frères africains de se comprendre, de communiquer ; tout ça est vraiment
extraordinaire."
-
"L'intellectuel n'est rien s'il ne vit pas entièrement dévoué à la cause
de son peuple, s'il n'est pas une part de ce peuple, rien qu'une part,
une part embrasée, mais une part tout de même, une part intégrée
puisqu'au centre, mais une part sans privilège, sans honneur
particulier. C'est cela être un intellectuel pour un peuple soumis,
humilié, bafoué, exploité, asservi : se fondre au sein de son peuple au
risque de s'y perdre."
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"D'ailleurs tu serais bien le premier nègre courageux et honnête, famille
royale ou pas. Laisse-moi t'admirer. En effet, l'espèce du nègre
courageux et honnête est tellement rare qu'il faudrait l'exposer dans un
musée zoologique, non sans l'avoir décoré avant de le vouer à
l'adoration religieuse de son illustre tribu. Tout le monde sait ici
qu'un animiste n'en est pas plus à un dieu qu'à une femme près."
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Jean-Marie Adé Adiaffi, né à Bettié le 1ᵉʳ
janvier 1941 et mort à Abidjan le 15 novembre 1999, est un écrivain,
scénariste, cinéaste et critique littéraire ivorien
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