SANS FAMILLE
Hector Malot
RÉSUMÉ
- "Né sous une bonne étoile": à première vue, ce
n'est pas le cas de Rémi, enfant trouvé, qui passe son âge tendre chez des
parents nourriciers avant d'être vendu à une sorte de vagabond saltimbanque,
musicien des rues et montreur de chiens savants.
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Sous les ordres de ce patron, le jeune garçon "sans famille" va
endurer les rigueurs de la vie itinérante et affronter toutes sortes
d'épreuves. Pour autant, il ne se découragera pas : son arme est de posséder
cette force de caractère qui, tôt ou tard, vous attire la bienveillance du
sort. Le lecteur, quant à lui, vibre et espère de toute son âme qu'au terme de
ce parcours très noir, compliqué d'une intrigue policière, la chance finira par
sourire à Rémi, qui le mérite amplement.
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Avec ce roman quasi mythologique, Hector Malot nous conte une histoire dont la
simplicité défie les modes. Son personnage de Vitalis, figure tragique
d'intermittent du spectacle, impose un type humain qui se grave dans les
mémoires : celui de l'homme au passé mystérieux que ni la déchéance sociale, ni
les vicissitudes d'une existence soumise à la pire précarité n'ont réussi à
abattre.
MORCEAUX CHOISIS
"Causant ainsi, je m'enhardis à lui dire que ce qui m'avait
le plus étonné dans cette répétition, ç'avait été l'inaltérable patience dont
il avait fait preuve aussi bien avec Joli-Coeur et les chiens, qu'avec moi. Il
se mit alors à sourire doucement :
- On voit bien, me dit-il, que tu n'as vécu jusqu'à ce jour qu'avec des paysans
durs aux bêtes et qui croient qu'on doit conduire celles-ci le bâton toujours
levé. C'est là une erreur fâcheuse : on obtient peu de choses par la brutalité,
tandis qu'on obtient beaucoup pour ne pas dire tout par la douceur. Pour moi,
c'est en ne me fâchant jamais contre mes bêtes que j'ai fait d'elles ce
qu'elles sont. Si je les avais battues, elles seraient craintives, et la
crainte paralyse l'intelligence. Au reste en me laissant aller à la colère avec
elles, je ne serais pas moi-même ce que je suis, et je n'aurais pas acquis
cette patience à toute épreuve qui m'a gagné ta confiance. C'est que qui
instruit les autres, s'instruit soi-même. Mes chiens m'ont donné autant de
leçons qu'ils en ont reçues de moi. J'ai développé leur intelligence, ils m'ont
formé le caractère.
Ce que j'entendais me parut si étrange, que je me mis à rire.
- Tu trouves cela bien bizarre, n'est-ce pas, qu'un chien puisse donner des
leçons à un homme? Et cependant rien n'est plus vrai. Réfléchis un peu.
Admets-tu qu'un chien subisse l'influence de son maître?
- Oh! Bien sûr.
- Alors tu vas comprendre que le maître est obligé de veiller sur lui-même
quand il entreprend l'éducation d'un chien. Ainsi suppose un moment qu'en
instruisant Capi je me sois abandonné à l'emportement et à la colère. Qu'aura
fait Capi? Il aura pris l'habitude de la colère et de l'emportement.
C'est-à-dire qu'en se modelant sur mon exemple, il se sera corrompu. Le chien
est presque toujours le miroir de son maître ; et qui voit l'un, voit l'autre.
Montre-moi ton chien ; je te dirai qui tu es. Le brigand a pour chien, un
gredin ; le voleur, un voleur ; le paysan sans intelligence, un chien grossier
; l'homme poli et affable un chien aimable....
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Hector-Henri Malot, né le 20 mai 1830 à La
Bouille, non loin de Rouen, et décédé le 18 juillet 1907 à Fontenay-sous-Bois,
est un romancier français
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